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AU SOIR DE LA PENSÉE

tance, par le moyen de vibrations lumineuses dont l’œil chimique de la membrane sensibilisée enregistre l’effet, qu’est ce que cela signifie, sinon qu’il est un état de l’énergie des choses où se consigne l’activité d’un appareil enregistreur qui prend acte d’une détermination de mouvements dans des périodes de la durée ? Et comme les vibrations du sujet impressionné par l’objet impressionnant s’inscriront dans leur ensemble, aux registres de notre sensibilité, nous aurons la sensation d’une conscience organique des choses au cours des successions d’activités de la vie. Ce sera la connaissance, plus ou moins achevée, des passages synchroniques du monde sur notre sensibilité avec des rencontres d’unisson. Le spectre, lumineux ou obscur, avec sa multitude de rayons susceptibles d’être diversement perçus, nous annonçait déjà de prochaines avenues en voie de s’éclairer à mi-chemin de l’épouvante et d’une extase d’éblouissement.

Ce phénomène est clairement de même ordre que le phénomène classique de la résonnance par lequel deux corps élastiques, susceptibles de donner le même son, c’est-à-dire dont le nombre de vibrations par seconde sera le même, manifestent la propriété de vibrer à l’unisson. La résonnance du diapason, ou les ondes utilisées en photographie, ne seraient que des manifestations particulières d’un phénomène général dont la cinétique n’est pas inconnue. Déjà peut-on comprendre que, dans l’universelle pénétration des ondes vibratoires, impliquant toutes compositions de rencontres, apparaissent des relations de correspondances cosmiques sur lesquelles tout ce que nous pouvons connaître du monde est fondé.

À ce titre, la fermentation rythmique du vin dans les caves au printemps et à l’automne, pourrait particulièrement nous frapper. Le vigneron, simpliste, y voit l’effort de la sève qui monte dans le fût ou dans la bouteille, aussi naturellement que dans le cep. De la sève libre à la sève emprisonnée, toutes deux simultanément réveillées au seuil et à l’issue du repos hivernal, il affirme d’instinct une correspondance éclatante. Rien ne paraît, en effet, plus simple à concevoir. Mais quelles communications cachées du pampre au flacon qui enclôt ses énergies, c’est ce que nous aimerions à connaître et ce dont le rustique ne s’embarrasse pas.

Pour élucider le mystère, je ne pouvais mieux faire que de