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LE MONDE, L’HOMME

cosmiques s’inscrivent au passage sur l’écran de sensibilité de nos tables nerveuses, miroir récepteur ou se jouent des aspects de notre individualité. Là viendront se dérouler les représentations des phénomènes du monde qui, méthodiquement enchaînés, nous feront boucler la boucle aux cinématographies d’images où le syncrétisme du Moi sera manifesté. Nous continuerons ainsi de partir du Moi dans la course à la connaissance (car il n’en peut-être autrement), mais pour en retrouver la source quand la phénoménologie générale nous l’aura fait rencontrer dans les activités du Cosmos. Le télescope étant donné, cherchons-y les signes qui nous révéleront l’univers et nous-mêmes — cosmiquement liés dans l’enchaînement élémentaire.

Nous reflétons des mouvements de rapports dont les classements font notre connaissance, et dans ces mouvements mêmes nous retrouvons d’expérience notre propre place dans l’ensemble. Il n’en peut résulter que l’univers soit en nous, puisque c’est nous qui nous retrouvons en lui. N’est-ce donc pas assez beau que nos surfaces de sensibilité permettent aux mouvements cosmiques de s’enregistrer, de se connaître, de se penser en l’homme sensibilisé ?


Les spectacles.


À quelques catastrophes près, les spectacles de la planète furent hier ce qu’ils sont présentement. La création continue, disait Philon le Juif, confirmé par la science d’aujourd’hui. Nous verrons ce qu’il est advenu des fameuses révolutions du globe imaginées par Cuvier pour venir au secours du Créateur biblique embarrassé par Lamarck dans l’affaire de la succession des espèces vivantes. Nos primitifs du quaternaire, puisqu’il n’est pas encore permis de fixer le cas du tertiaire, eurent pour première occupation de sentir, de regarder, à l’exemple de leurs ancêtres prochains ou éloignés. Cependant, regarder n’est pas nécessairement voir, encore moins observer. Tout au long de la série animale, nous trouvons toutes gradations de sensations, d’observations, de connaissances, ou de méconnaissances, avec