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LES SYMBOLES

de cette histoire incroyablement touffue. La barre transversale indiquerait la course du soleil[1], coupée du trait vertical qui va du nord au midi. Indication primitive des quatre points cardinaux. « La croix des tribus sud-américaines, dit un explorateur, est une véritable rose des vents ».

Chaldéens, Indiens, Perses, Grecs, avec les Gaulois et les tribus autochtones des deux Amériques, nous offrent la même croix équilatérale, dont parfois chaque bras s’achève en une pointe de flèche, comme pour indiquer la marche du rayon solaire.

La croix équilatérale est universellement répandue. Je l’ai rencontrée au Palais de Knossos (dit de Minos) en Crète, avec la fleur de lis, dans la Grèce antique sur des vases d’usage courant. Quand les Espagnols trouvèrent la croix équilatérale chez les Indiens de l’Amérique du Sud, ils en conclurent bonnement que le nouveau continent avait été évangélisé avant d’être découvert. En Chine, par opposition à la courbe de la voûte céleste, la terre, toujours réputée plane, se figure par un carré. La croix équilatérale qui s’y inscrit est d’une haute figuration cosmique. D’autres fois, le disque du ciel, surmonté de la croix, sera l’image exacte du globe chrétien que portaient, hier encore, les statues de nos rois. On saisit la peut-être l’enchaînement des suggestions impliquant une systématisation des Puissances. La croix équilatérale la plus ancienne se rencontre aux cavernes quaternaires, tandis que la plus récente accompagne, aujourd’hui même, la signature de nos curés.

La croix en double maillet est des Égyptiens, des Celtes, des Germains, qui en feront, par la métaphore du choc fécondateur, un instrument de vie et de reproduction. La croix en forme de double potence (qui a survécu dans le Tau grec) se rencontre en Palestine, en Gaule, en Germanie, chez les Phéniciens comme dans l’Amérique centrale. Le prophète Ézéchiel nous fait connaître que c’était un « signe de vie et de salut ».

Plus tard, quelques modifications de dessin en feront l’idéo-

  1. Il s’expliquerait, aussi, que la barre transversale, indiquant la course du soleil, fût devenue plus tard une représentation de la terre, exprimée par le cours de la surface planétaire successivement éclairée au passage du divin flambeau.