Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/393

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Votre bras en porte-t-il encore la marque ?… Laissez-moi la voir !

— Pourquoi cette curiosité ?

— Je veux la voir, Laura, parce que notre patience doit avoir un terme, et parce que, dès aujourd’hui, notre résistance doit commencer. Cette marque est une arme dont on peut se servir contre lui… Montrez-la-moi sur-le-champ ! — Je puis avoir, un jour, dans un avenir quelconque, à prêter serment que je l’ai vue.

— Oh ! Marian, quel regard !… ne parlez pas ainsi ! mon bras ne me fait plus mal, maintenant !

— Montrez-le-moi !…

Elle me montra les marques. Il n’y avait pas à s’affliger, à pleurer à gémir sur elles. On dit généralement que nous sommes ou pires ou meilleures que les hommes. Si la tentation vengeresse que quelques femmes ont rencontrée sur leur route, et qui s’est trouvée trop forte pour elles, s’était, en ce moment, offerte à moi… Dieu en soit loué, mon visage ne révéla rien dont la femme de sir Percival pût jamais se prévaloir !… Cette douce créature, toute innocence, toute affection, crut que je tremblais, que je m’affligeais pour elle, — et ne devina pas autre chose.

— N’y attachez pas trop d’importance, Marian ! dit-elle simplement en baissant la manche qu’elle avait relevée, je vous assure qu’à présent mon bras ne me fait plus mal.

— J’essaierai pour vous complaire, chère sœur, de me résigner à tout ceci… C’est bien ! c’est très-bien !… Et vous lui avez révélé alors tout ce que vous avait dit Anne Catherick, tout ce que vous m’aviez raconté à moi-même.

— Oui, tout. Il le voulait absolument ; … j’étais seule avec lui ; … qu’aurais-je pu lui déguiser ?

— Quand vous eûtes fini, dit-il quelque chose ?

— Il me regarda, et se prit à rire en lui-même, avec une sorte d’amertume ironique : — Je prétends que vous ne gardiez rien par devers vous, me dit-il ; il me faut le reste… Vous m’entendez bien ?… le reste… — Je lui dé-