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de faire passer mes deux lettres dans les mains de Fanny.

— Vous les avez donc écrites, ces lettres ? Oh ! Marian, ne vous exposez pas ! Je vous en supplie, ne courez pour moi aucuns risques !

— Non, non, — n’ayez pas peur !… Quelle heure est-il, maintenant ?…

Il était six heures moins un quart. J’avais le temps d’aller à l’auberge du village, et de revenir avant le dîner. Si j’attendais jusqu’au soir, je pourrais fort bien ne pas trouver une seconde occasion de quitter en toute sûreté le château.

— Laissez la clef dans votre serrure, dis-je à Laura, et n’ayez pour moi aucune crainte. Si vous entendez demander où je suis, appelez à travers la porte, et dites que je suis allée prendre l’air !

— Quand serez-vous de retour ?

— Sans faute, avant le dîner. Courage, ma chère belle. D’ici à demain nous aurons, agissant pour vous, un brave homme dont les idées sont nettes et les intentions sincères. Après M. Gilmore lui-même, notre meilleur ami est certainement l’associé de M. Gilmore…

Un moment de réflexion, dès que je fus seule, me convainquit que je ferais mieux de ne pas me montrer dans mon costume de promenade avant de m’être assurée de ce qui se passait à l’étage inférieur du château. Je ne m’étais pas encore informée de sir Percival, et il fallait savoir s’il était sorti ou non.

Le ramage des canaris dans la bibliothèque, et l’odeur de tabac qui filtrait à travers la porte restée entr’ouverte, m’apprirent immédiatement où était le comte. J’y jetai, en passant, un coup-d’œil par-dessus mon épaule, et m’aperçus, à mon grand, étonnement, qu’il faisait pour la femme de charge, avec toutes les recherches de sa politesse obséquieuse, une exhibition complète de ses oiseaux si bien appris.

Il avait dû tout spécialement l’inviter à les venir voir ; d’elle-même, en effet, jamais elle n’eût osé pénétrer dans