Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/433

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Comme il parlait, la lumière s’éteignit dans la chambre de madame Fosco, et tout le premier étage du château se trouva plongé dans l’obscurité.

— Des mots ! des mots ! grommelait sir Percival. Ne croirait-on pas, à vous entendre, que la signature de ma femme est déjà tout obtenue ?

— Vous avez mis l’affaire entre mes mains, répliqua le comte, et j’ai à ma disposition plus de deux mois pour la mener à bien. N’en parlons plus actuellement, s’il vous plaît. Lorsque les billets viendront à échoir, vous verrez par vous-même si ce que vous appelez « des mots » vaut quelque chose ou ne signifie rien. Et, maintenant, Percival, que nous en avons fini pour ce soir avec les affaires d’argent, me voici tout prêt à vous écouter, si vous avez à me demander conseil sur cette seconde difficulté qui est venue si mal à propos compliquer nos petits embarras ; elle vous a tellement changé, — en mal, il faut bien le dire, — que c’est tout au plus si je vous reconnais. Parlez, mon ami… et veuillez m’excuser si je blesse vos rudes appétits nationaux en me préparant un second verre d’eau sucrée.

— Parler, parler !… c’est facile à dire, répondit sir Percival d’un ton bien plus tranquille et plus poli qu’au début de l’entretien ; mais il n’est pas si facile de savoir par où entrer en matière.

— Faut-il vous aider ? insinua le comte. Faut-il donner un nom propre à cette petite difficulté qui vous arrête ?… Eh bien ! supposez que nous l’appelions : Anne Catherick ?

— Voyons, Fosco !… Nous nous connaissons, vous et moi, depuis longtemps ; et si, avant celle où nous sommes, vous m’avez déjà aidé à sortir d’une ou deux passes assez difficiles, j’ai fait, en retour, tout ce que je pouvais pour vous être utile, au moins pécuniairement. Il y a eu, de part et d’autre, autant de sacrifices que deux amis s’en peuvent faire ; mais, tout naturellement, nous avons eu nos secrets l’un pour l’autre… n’est-il pas vrai ?

— C’est-à-dire, Percival, que vous avez eu un secret