Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/579

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probabilité, lui dis-je ; et vous prendrez soin, comme à l’ordinaire, de ne laisser personne pénétrer ici en mon absence. Mais s’il arrivait quelque chose…

— Que peut-il arriver ? interrompit-elle vivement. Si vous entrevoyez quelque danger, Walter, dites-le moi sans détour, et je saurai bien y faire face.

— Le seul danger, répondis-je, c’est que la nouvelle de l’évasion de Laura ait pu rappeler à Londres sir Percival Glyde. Vous savez qu’il m’a fait guetter avant mon départ d’Angleterre, et que probablement il me connaît de vue, bien que je n’aie pas sur lui le même avantage…

Elle posa sa main sur mon épaule, et, dans une muette inquiétude, me contempla longuement. Je voyais qu’elle appréciait parfaitement la gravité du péril suspendu sur nos têtes.

— Il n’est pas probable, lui dis-je, que ma piste soit de sitôt retrouvée à Londres, ou par sir Percival lui-même, ou par les agents qu’il emploie ; mais il n’est pas absolument impossible qu’il arrive quelque accident. Cela étant, et si je manquais à revenir ce soir, il ne faudrait pas vous alarmer ; il faudrait, au contraire, trouver les meilleures défaites que vous pourrez, afin d’empêcher que Laura ne s’inquiète. Si j’avais la moindre raison de soupçonner qu’on a l’œil sur moi, je prendrais soin que nul espion ne pût m’escorter jusqu’à ce logis. Si loin qu’il puisse être ajourné, croyez, Marian, croyez fermement à mon retour ; croyez-y, et ne craignez rien !

— Bien ! répondit-elle avec fermeté. Vous n’aurez point à regretter, Walter, de n’avoir pour aide qu’une femme. Elle s’arrêta et me tint un instant de plus… Prenez garde ! me dit-elle en me pressant la main avec inquiétude, — au nom de Dieu, prenez garde !

Je la quittai ; je partis pour frayer la route aux découvertes, — route obscure, ambiguë, qui allait s’ouvrir à la porte de l’avocat.