Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/617

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Oui. Sir Percival Glyde…

Mon cœur battait la charge. Je me figurais avoir mis la main sur le fil conducteur. Que je savais peu, à ce moment, par quels détours inextricables j’avais à passer encore avant de sortir du labyrinthe ?

— Est-ce que sir Percival habitait à cette époque vos environs ? demandai-je.

— Non, monsieur ; il nous arriva tout à coup, étranger à la communauté. Son père était mort, peu de temps auparavant, hors d’Angleterre. Je me rappelle que le fils était encore en deuil. Il descendit à la petite auberge sur la rivière (ils l’ont démolie depuis lors), un endroit où les gentlemen venaient volontiers s’installer pour la pêche. On ne prit pas beaucoup garde à lui dans les premiers temps de son arrivée ; c’était une chose commune que de voir venir, de tous les comtés d’Angleterre, des touristes pêcheurs attirés par notre rivière.

— Son apparition dans le village fut-elle antérieure à la naissance d’Anne Catherick ?

— Oui, monsieur : Anne vint au monde au mois de juin 1827 ; et je crois qu’il arriva, lui, vers la fin d’avril ou le commencement de mai.

— Et parmi vous il n’était connu de personne ? pas plus de mistress Catherick que de vos autres voisins ?

— Nous le crûmes ainsi tout d’abord, monsieur. Mais, quand le scandale éclata, personne ne voulut admettre qu’ils ne se connaissaient point. Je me rappelle la chose comme si c’était hier. Catherick, une nuit, vint dans notre jardin, et nous réveilla en jetant aux carreaux une poignée du sable des allées. Je l’entendis prier mon mari, pour l’amour de Dieu, de descendre lui parler. Ils restèrent longtemps à causer sous le porche. Quand mon mari remonta, il était tout tremblant. Assis à côté du lit : — Lizzie ! me fait-il, je vous ai toujours dit que cette femme ne valait rien ; je vous ai toujours dit qu’elle finirait mal ; … et je crains bien, au fond, que ce ne soit déjà fait. Catherick a trouvé, cachés dans les tiroirs de sa femme, un tas de mouchoirs garnis de dentelles, deux belles bagues, et une montre d’or toute neuve avec sa