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que les moyens de vivre deviennent moins périlleux et moins précaires ; l’agriculture, qui peut nourrir un plus grand nombre d’individus sur le même terrain, remplace les autres sources de subsistance : elle favorise cette multiplication, qui, réciproquement, en accélère les progrès ; les idées acquises se communiquent plus promptement et se perpétuent plus sûrement dans une société devenue plus sédentaire, plus rapprochée, plus intime. Déjà l’aurore des sciences commence à paroître ; l’homme se montre séparé des autres espèces d’animaux, et ne semble plus borné comme eux à un perfectionnement purement individuel.

Les relations plus étendues, plus multipliées, plus compliquées, que les hommes forment alors entre eux, leur font éprouver la nécessité d’avoir un moyen de communiquer leurs idées aux personnes absentes, de perpétuer la mémoire d’un fait avec plus de précision que par la tradition orale, de fixer les conditions d’une convention plus sûrement que par le souvenir des témoins, de constater, d’une manière moins sujette à des changemens, ces coutumes respectées,