Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/18

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— Comment je les trouve, John ? Mais, franchement, ni bien ni mal, puisqu’il faut vous le dire.

— Eh bien ! alors, ma chère sœur, il y a sympathie dans nos sentiments, comme dirait Jane.

— John !

— Émilie !

— Je n’aime pas à vous entendre parler avec aussi peu d’égards de notre sœur, d’une sœur que, j’en suis sûre, vous aimez aussi tendrement que moi.

— J’avoue ma faute, dit John, en lui prenant la main avec affection, et je tâcherai de n’y plus retomber ; mais pour en revenir à ce colonel Egerton, c’est bien certainement un gentilhomme, autant par l’éducation que par la naissance, comme Jane…

Émilie l’interrompit en souriant, et lui mettant le doigt sur la bouche pour lui rappeler sa promesse. John se soumit de bonne grâce sans faire de nouveau allusion à sa sœur.

— Oui, dit Émilie, ses manières sont nobles et gracieuses, si c’est là ce que vous voulez dire. Quant à sa famille, nous ne la connaissons point.

— Oh ! j’ai jeté un coup d’œil dans l’almanach des familles nobles de Jane, et je vois qu’il y est porté comme neveu et héritier de sir Edgar.

— Il y a en lui quelque chose qui ne me plaît point, dit Émilie d’un air réfléchi : il est trop à son aise… ; et cet abandon apparent est chez lui une étude ; ce n’est point la nature. Je crains toujours que ces sortes de gens ne me tournent en ridicule aussitôt que je suis absente, tandis qu’ils m’accablent en face de leurs flatteries musquées. Si j’osais prononcer, je dirais qu’il lui manque ce qui peut donner du prix aux autres qualités.

— Et quoi donc ?

— La franchise.

— En effet, j’ai déjà eu un échantillon de celle du colonel, dit John avec un sourire. Vous savez bien ce capitaine Jarvis qui était sorti pour aller tuer des cailles et des faisans… ?

— Vous oubliez, mon frère, que le colonel a expliqué que c’était une méprise.

— Sans doute, mais par malheur j’ai rencontré le capitaine qui revenait le fusil sur l’épaule, et suivi d’une meute, de chiens.