Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/44

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seley sacrifia son amour pour l’apparat à sa tendresse pour sa fille.

Clara, ivre de joie, l’embrassa de nouveau, et, accompagnée d’Émilie, elle quitta l’appartement.

Jane s’était levée pour les suivre ; mais, apercevant par la fenêtre le tilbury du colonel Egerton, elle reprit sa place et attendit son arrivée avec impatience. — Il était envoyé, dit-il, par Mrs Jarvis pour prier miss Jane de lui faire l’amitié de venir passer une partie de la soirée avec ses filles. Elles avaient quelques projets en tête, pour lesquels elle leur était absolument indispensable.

Mrs Wilson regarda gravement sa sœur, qui exprimait son consentement au colonel par un doux sourire ; et sa fille, qui l’instant auparavant avait oublié qu’il existât au monde d’autre personne que Clara, courut chercher son châle et son chapeau, afin, disait-elle, de ne pas faire attendre trop longtemps le colonel.

Lady Moseley la suivit des yeux par la fenêtre, jusqu’à ce qu’elle l’eût vue prendre place dans le tilbury, et elle revint ensuite s’asseoir auprès de sa sœur d’un air de contentement et de satisfaction.

Pendant quelque temps les deux sœurs gardèrent le silence, chacune leur ouvrage à la main, car elles n’avaient ni l’une ni l’autre assez de déférence pour la mode pour rougir de travailler elles-mêmes. Elles semblaient livrées toutes deux à leurs réflexions, lorsque enfin Mrs Wilson lui demanda tout à coup :

— Quel est donc ce colonel Egerton ?

Lady Moseley la regarda de l’air du plus grand étonnement, et il lui fallut quelques minutes avant qu’elle pût répondre : — Mais sans doute, le neveu et l’héritier de sir Edgard Egerton, ma sœur.

Ces paroles furent prononcées d’un ton positif, comme s’il n’y avait plus rien à dire. Mrs Wilson n’en continua pas moins :

— Ne croyez-vous point qu’il fasse la cour à Jane ?

Le plaisir étincela dans les yeux brillants de lady Moseley, et elle répondit :

— Le croyez-vous, ma sœur ?

— Oui, sans doute, et pardonnez-moi si je vous parle avec franchise, mais il me semble que vous avez eu tort de permettre à Jane de l’accompagner sans vous.

— Et pourquoi donc, Charlotte ? Quand le colonel Egerton se donne la peine de venir chercher ma fille de la part d’une amie,