Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 22, 1845.djvu/164

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nât en pleine mer. Nous courûmes plus d’une fois risque de nous briser contre les dangereux écueils que nous rencontrions sans cesse ; mais la même Providence qui nous avait si admirablement protégés, nous préserva de ce péril. Jamais je ne fus plus heureux que quand je vis le jour revenir.

Le canal était encore rempli d’îles ; mais comme nous pouvions voir clair, il fut possible d’en sortir. À la fin, toutefois, notre route se trouva fort difficile. De grandes îles séparées par des canaux étroits s’offraient à nous de toutes part. Nous avions toutefois en face un petit promontoire, et nous continuâmes à avancer afin de le doubler. Il était dix heures quand nous approchâmes de cette pointe, et nous trouvâmes un passage à l’ouest, qui conduisait à l’Océan. Ce résultat, quand il fut bien certain, fut salué par trois acclamations de l’équipage ; le bâtiment vira de bord aussitôt, et, porté par la marée, il fit une entrée triomphale dans la mer.

Le capitaine Williams nous dit alors de prendre nos quarts de cercle, car le ciel était sans nuage, et le temps devait être favorable pour observer le soleil. Il était important de connaître la latitude de notre découverte. Le moment arriva, et nous nous préparâmes à faire nos observations, les uns annonçant d’avance un degré, les autres un autre ; quant au capitaine, il pensait que nous étions encore à l’est du cap, mais il était certain que nous étions arrivés à l’ouest du détroit de Lemaire. Marbre gardait le silence, mais il avait observé et fait ses calculs, avant qu’aucun autre eût commencé les siens. Je le vis secouer la tête et aller consulter la carte sur le dôme de l’échelle de l’arrière, et je l’entendis s’écrier :

— C’est la mer Pacifique, par saint Kennebunk ! c’était son juron favori, quand il était dans un état de surexcitation : — nous avons passé le détroit de Magellan sans le savoir !


CHAPITRE XII.


Sonnez, trompettes ! — Levez l’ancre ; déployez les voiles ! Les bannières impatientes flottent déjà du côté de la mer. Comme si c’était le ciel qui nous envoyait cette brise favorable, notre léger esquif semble avoir puisé la vie à ce souffle divin ; tant il court rapidement.
Pineney.


Notre brave bâtiment, la Crisis, avait, ce qui arrive souvent, fait une action d’éclat par le pur effet du hasard. Si cet exploit, au lieu d’avoir lieu en 1800, avait été effectué en 1519, le fameux passage