Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 25, 1846.djvu/25

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ayant vu plus de dix fois de mes propres yeux les satellites de Jupiter. Nous avions un maître très-expert en astronomie, et qui eût été de force à nous montrer l’anneau de Saturne, s’il avait pu découvrir la planète : ce fut le seul obstacle qui l’arrêta.

Mes quatre années de collège furent un heureux temps. Les vacances étaient fréquentes, et j’allais constamment les passer à la maison. J’ai toujours trouvé du plaisir à m’instruire, et je puis dire, je crois, sans vanité, à l’âge où je suis parvenu, que j’occupais la troisième place dans ma classe. Nous aurions eu quatre gradués, si l’un de nos compagnons n’était tombé malade au moment des examens. Nous nous en tirâmes à notre honneur ; seulement j’entendis mon grand-père dire à M. Worden qu’il aurait été plus content de nos dissertations, si nous avions moins parlé de la prospérité croissante et phénoménale des colonies. Il était loin de blâmer qu’on fût bon patriote ; mais il ne voyait pas la nécessité de le répéter sur tous les tons et à peu près dans les mêmes termes.

Quant au gué de Powles-Hook, j’avoue qu’il méritait sa réputation, quoique je m’en inquiétasse peu alors. Ma mère ne se sentit pas d’aise quand je le passai pour la dernière fois ; et les premiers mots qu’elle prononça en m’embrassant furent ceux-ci : Grâce au ciel, Corny, tu n’auras plus jamais besoin de passer cet horrible gué, maintenant que tu es sorti du collège. Ma pauvre mère ne songeait pas alors que j’aurais bien d’autres dangers à courir dans le monde ; et même elle se trompait dans ses prévisions, car combien de fois n’ai-je pas fait depuis la même traversée !

C’était une recommandation pour un jeune homme, en 1755, d’avoir pris ses grades dans un collège. Dans la classe surtout à laquelle j’appartenais, les exemples n’en étaient pas fréquents. Il semblait que par là j’eusse donné le droit d’être plus exigeant à mon égard. Quoi qu’il en soit, je ne crois pas avoir fait honte à notre alma Mater ; et les connaissances que j’eus le bonheur d’acquérir furent loin de m’être inutiles par la suite.

J’entretins une correspondance active avec Dirck Follock pendant tout le temps de mon séjour au collège. Il resta encore deux ans à l’école de M. Worden ; mais je ne sais trop ce qu’il y ap-