Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 28, 1850.djvu/15

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lorsqu’il s’arrêta sur la plage d’Oyster-Pond, à cent milles environ de son île, ou il espérait avoir encore le temps d’arriver.

Dagget était pauvre, inconnu et sans amis, comme il l’avouait lui-même. Il avait cependant une assez lourde valise semblable à celles, dont les matelots se servent à bord des vaisseaux marchands. On voyait qu’elle avait fait autant de voyages que celui qui en était le propriétaire, et qui avait réussi à la sauver de trois naufrages. Cependant, quand il ouvrit cette avalise, le contenu n’en parut pas être d’une grande valeur.

Quand il fut débarqué, cet homme fit un arrangement avec une veuve, proche voisine de M. Pratt, chez laquelle il se mit en pension, jusqu’à ce qu’il pût se rendre au vineyard. Dagget se promena d’abord beaucoup, et chercha à respirer le grand air. Lorsqu’il était encore capable de marcher, il rencontra le diacre, et quelque incroyable que cela parut à sa nièce, une espèce d’amitié pour ne pas dire d’intimité, se forma entre M. Pratt et cet étranger. Le diacre avait soin ordinairement de ne former aucune liaison intime avec les personnes nécessiteuses, et la veuve White eût bientôt dit à tout le monde que son hôte n’avait pas un rouge liard. Il avait des objets cependant qui ont quelque valeur pour des marins, et déjà l’on s’était adressé à ce sujet à Roswell Gardiner ou « Gar’ner » comme on l’appelait, le jeune marin par excellence d’Oyster-Pond, qui non-seulement avait été à la pêche de la baleine, mais à la chasse du veau marin, et qui, en ce moment, se trouvait à bord du schooner du diacre en qualité de maître ou de capitaine. Grâce à l’intervention de Gar’ner, ces objets, qui ne pouvaient plus servir à Dagget, avaient été envoyés et vendus à Sag-Harbour, au profit du matelot. Voilà comment l’étranger avait pu, depuis quelques semaines, payer sa pension, qui heureusement n’était pas chère.

Ses relations avec Gardiner lui furent encore favorables. Il existait entre Marie Pratt et Roswell Gardiner une amitié d’enfance dont le caractère avait quelque chose de tout particulier, et à laquelle nous aurons l’occasion de revenir. Marie était toute charité, et Gardiner le savait. Lorsque Dagget eut besoin de certains secours que l’argent même ne pouvait procurer, le jeune