Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 28, 1850.djvu/21

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— Oui, ç’aurait été plus naturel de la part d’une femme, il faut l’avouer, repartit la veuve Stone un peu sèchement. Si le diacre avait été femme, j’en suis sûre, Betsy, vous n’auriez pas fait tant d’attention à ses visites.

— Je n’y songe guère, reprit la veuve assez innocemment. Mais il est extraordinaire qu’un homme visite autant les malades, et surtout un diacre du meeting.

— Oui, ce n’est pas aussi ordinaire que cela pourrait être, surtout parmi les diacres. Mais, venez, Betsy, et je vous montrerai le texte sur lequel le ministre a prêché ce matin ; il est bien fait pour fixer notre attention, car il est question de nous autres pauvres veuves.

Et les deux femmes passèrent dans une autre chambre, où nous les laisserons discuter les parties saillantes du sermon, au milieu de beaucoup d’interruptions de la veuve White, qui ne pouvait revenir de l’étonnement extrême que lui causaient les visites du diacre Pratt, chez elle, les jours du sabbat, aussi bien que les jours ouvriers.

Cependant les deux hommes causaient aussi ; le diacre Pratt annonçait au malade, avec une certaine affectation, qu’il avait envoyé chercher un médecin pour lui.

— J’en ai fait à ma tête ou plutôt à mon cœur, ajouta le diacre. Il m’était pénible de voir vos souffrances sans chercher à y porter remède. Alléger les peines de l’âme et du corps, comme les tortures de la conscience, n’est-ce pas un des devoirs les plus doux d’un chrétien ? Oui, j’ai envoyé Gar’ner au port, et dans trois ou quatre heures, il sera ici avec le docteur Sage.

— Au moins j’espère que j’aurai les moyens de payer toute cette dépense, reprit Dagget d’un ton de doute qui effraya beaucoup son ami. Un peu plus tôt, un peu plus tard, il faut que je meure ; mais si je pouvais vivre assez pour retourner au Vineyard, là ma part d’héritage suffirait à tous mes besoins. Je puis vivre encore assez pour voir la fin de l’autre affaire.

Parmi les histoires du matelot, il y en avait une sur laquelle il revenait souvent, à savoir qu’il n’avait jamais reçu sa part de la fortune de son père ce qui était assez vrai, quoiqu’il ne