Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 5, 1839.djvu/7

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à la corruption des langages primitifs, et aux dialectes qui se sont formés. L’auteur se rappelle avoir été présent à une entrevue entre deux chefs des grandes Prairies, à l’ouest du Mississipi ; les guerriers paraissaient de la meilleure intelligence et causaient beaucoup ensemble en apparence ; cependant, d’après le récit de l’interprète qui avait été nécessaire, chacun d’eux ne comprenait pas un mot de ce que disait l’autre. Ils appartenaient à des tribus hostiles, étaient amenés l’un vers l’autre par l’influence du gouvernement américain, et il est digne de remarque qu’une politique commune les porta à adopter le même sujet de conversation. Ils s’exhortèrent mutuellement à se secourir l’un l’autre, si les chances de la guerre les jetaient entre les mains de leurs ennemis. Quelle que soit la vérité touchant les racines et le génie des langues indiennes, il est certain qu’elles sont maintenant si distinctes dans leurs mots, qu’elles ont tous les inconvénients des langues étrangères : de là naissent les difficultés que présente l’étude de l’histoire des différentes tribus, et l’incertitude de leurs traditions.

Comme les nations d’une plus haute importance, les Indiens d’Amérique donnent sur leur propre caste des détails bien différents de ceux qu’en donnent les autres tribus. Ils sont très portés à estimer leurs perfections aux dépens de celles de leurs rivaux ou de leurs ennemis ; trait qui rappellera sans doute l’histoire de la création par Moïse.

Les blancs ont beaucoup aidé à rendre les traditions des aborigènes plus obscures, par leur manie de corrompre les noms. Ainsi, le nom qui sert de titre à cet ouvrage a subi les divers changements de Mahicanni, Mohicans et Mohegans ; ce dernier est communément adopté par les blancs. Lorsqu’on se rappelle que les Hollandais, qui s’établirent les premiers à New-York, les Anglais et les Français, donnèrent tous des noms aux tribus qui habitèrent le pays où se passe la scène de ce roman, et que les Indiens non seulement donnaient souvent différents noms à leurs