Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/46

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tion qui distingue les sectaires, il ordonna à sa famille de le suivre, afin qu’aucune exclusion inutile ne donnât naissance à des conjectures ou n’excitât des soupçons que les circonstances après tout, ne pourraient justifier. Malgré les manières soumises du siècle et du pays, la curiosité, peut-être aussi un sentiment plus louable, était portée à un tel point, que chacun obéit à cet ordre muet en s’avançant aussi promptement vers la porte ouverte que le permettait la décence.

Le vieux Mark Heathcote occupait la chaise sur laquelle on l’avait laissé, avec ce calme et ce regard grave qu’on croyait alors convenables à l’humilité d’esprit ; mais l’étranger avait disparu. Il y avait deux ou trois issues par lesquelles on pouvait quitter l’appartement et même la maison sans être vu de ceux qui avaient attendu si longtemps pour être admis ; et la première pensée qui vint à la famille fut qu’on allait voir rentrer l’étranger par un de ces passages extérieurs. Cependant Content lut dans les yeux de son père que si le moment de la confiance devait jamais arriver, il n’était pas encore venu ; et la discipline domestique de cette famille était si parfaite et si admirable, que les questions que le fils ne trouvait point convenable d’adresser, ceux d’une condition inférieure ou d’un âge moins raisonnable n’osèrent les tenter. Avec l’étranger tout signe de sa visite récente avait aussi disparu.

Le jeune Mark ne retrouva plus l’arme qui avait excité son admiration. Whittal chercha en vain le couteau de chasse qui avait trahi le sort du malheureux mouton ; mistress Heathcote vit, par un regard rapide, que les sacs de cuir, qu’elle avait jugé devoir être transportés dans la chambre à coucher de l’inconnu, étaient enlevés, et une charmante petite fille, image vivante de sa mère, qui portait son nom ainsi que ses traits, qui avaient rendu Ruth si attrayante dans sa première jeunesse, chercha sans succès un éperon d’argent massif, d’un travail antique et curieux, avec lequel il lui avait été permis de jouer jusqu’au moment où la famille s’était retirée.

Déjà était passée l’heure où des gens dont les habitudes étaient si simples avaient l’habitude de se coucher. Le grand-père alluma un flambeau, et après avoir donné la bénédiction ordinaire à ceux qui l’entouraient, il se prépara avec un air de calme, comme s’il n’était rien arrivé d’étrange dans la soirée, à se retirer dans sa chambre. Cependant quelque chose d’intéressant semblait occuper son esprit. Lorsqu’il fut sur le seuil de la porte, il s’arrêta un