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Dis que j’ai violé les deux lois les plus saintes,
Qui nous rendent heureux par leurs douces contraintes ;
Dis que j’ai corrompu, dis que j’ai suborné,
Falsifié, trahi, séduit, assassiné 293 :
Tu n’en diras encor que la moindre partie.
Quoi ! Tircis est donc mort, et Mélite est sans vie !
Je ne l’avois pas su, Parques, jusqu’à ce jour,
Que vous relevassiez de l’empire d’Amour ;
J’ignorois qu’aussitôt qu’il assemble deux âmes,
Il vous pût commander d’unir aussi leurs trames 294.


293. Var. [Falsifié, trahi, séfluit, assassiné,]
Que j’ai toute une ville en larmes convertie :
[Tu n’en diras encor que la moindre partie.]
Mais quel ressentiment ! quel puissant déplaisir !
Grands Dieux ! et peuvent-ils jusque-là nous saisir,
Qu’un pauvre amant en meure, et qu’une âpre tristesse
Réduise au même point après lui sa maîtresse ?
clit. Tous ces discours ne font… ér. Laisse agir ma douleur.
Traître, si tu ne veux attirer ton malheur :
Interrompre son cours, c’est n’aimer pas ta vie.
La mort de son Tirsis me l’a doncques ravie !
[Je ne l’avois pas su, Parques, jusqu’à ce jour.] (1633-57)

294. Var. [Il vous pût commander d’unir aussi leurs trames ;]
J’ignorois que, pour être exemptes de ses coups,
Vous souffrissiez qu’il prit un tel pouvoir sur vous.
[Vous en relevez donc, et vos ciseaux barbares]
Tranchent comme il lui plaît les choses les plus rares !
Vous en relevez donc, et pour le flatter mieux
Vous voulez comme lui ne vous servir point d’yeux !
Mais je m’en prends à vous, et ma funeste ruse,
Vous imputant ces maux, se bâtit une excuse ;
J’ose vous en charger, et j’en suis l’inventeur,
Et seul de ces malheurs ah le détestable auteur.
Mon courage, au besoin se trouvant trop timide
Pour attaquer Tirsis autrement qu’en perfide.
Je fis à mon défaut combattre son ennui,
Son deuil, son désespoir, sa rage, contre lui.
Hélas ! et falloit-il que ma supercherie
Tournât si lâchement son amour en furie ?
Falloit-il, l’aveuglant d’une indiscrète erreur,

ah. Les éditions de 1633 et de 1644 donnent, mais par erreur sans doute : « ses malheurs, » pour « ces malheurs. »