Page:Corneille - Marty-Laveaux 1910 tome 2.djvu/45

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Il te montre un objet d’autant plus souhaité,
Que plus sa connaissance a de difficulté.
C’est par là que ton feu davantage s’allume :
Moins on l’a pu connaître, et plus on en présume ;
Notre ardeur curieuse en augmente le prix.

Dorimant.

Que tu sais cher ami, lire dans les esprits !
Et que, pour bien juger d’une secrète flamme,
Tu pénètres avant dans les ressorts d’une âme !

Lysandre.

Ce n’est pas encor tout, je veux te secourir.

Dorimant.

Oh, que je ne suis pas en état de guérir !
L’amour use sur moi de trop de tyrannie.

Lysandre.

Souffre que je te mène en une compagnie
Où l’objet de mes vœux m’a donné rendez-vous ;
Les divertissements t’y sembleront si doux,
Ton âme en un moment en sera si charmée
Que, tous ses déplaisirs dissipés en fumée,
On gagnera sur toi fort aisément ce point
D’oublier un objet que tu ne connais point.
Mais garde-toi surtout d’une jeune voisine
Que ma maîtresse y mène ; elle est et belle et fine,
Et sait si dextrement ménager ses attraits,
Qu’il n’est pas bien aisé d’en éviter les traits.

Dorimant.

Au hasard, fais de moi tout ce que bon te semble.

Lysandre.

Donc, en attendant l’heure, allons dîner ensemble.