Page:Corneille Théâtre Hémon tome4.djvu/76

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Eu chercher d’assez vils pour braver uos rivages.
Je les vis se choisir jusqu à ciuq et six fois,
Et rouvrir auss’tôt uous comparant leur choix;
Et cette vau té qu’eu toutes les t’amiUes
Ou voit si naturelle aux mcrcs pour leurs filles,
Leur cria par ma bouche : » Eu est-il parmi vous,
uymphes ! (pii ne ci’-de à des attraits si doux?
Et pourriez-vous nier, vous autres immortelles,
Qu’entre nous la nature eu forme de plus ))elles"? »
Je m’emportais sans doute, et c’en était trop dit :
Je les vis s’en cacher de honte et de dépit;
J’en vis dedans leurs yeux les vives étincelles :
L’onde qui les reçut s’en irrita pour elles.

Ce dernier vers, remarque Voltaire, est comme le précurseur de celui de Racine :

Le flot qui l’apporta recule épouvanté i.

Vomi par la mer en furie, un monstre a désolé les champs et les villes, et Neptune exige que chaque mois une vierge désignée par le sort soit exposée au monstre vengeur des Néréides.

Déjà nous avons vu cinq beautés dévorées,
Mais des beautés, hélas! dignes d’être adorées,
Et de qui tous les traits, pleins d’un céleste feu,
Ne cédaient qu’à ma fille et lui cédaient bien peu :
Comme si, choisissant de plus belle en plus b-lle,
Le sort par ces degrés tâchait d’approcher d’elle,
Et que, pour élever ses traits jusqucs à nous,
Il essayât sa force et mesurât ses coups.
Rien n’a pu jusqu’ici toucher ce dieu barbare.
Et le sixième choix aujourd’hui se prépare :
Ou le va faire au temple, et je sens malgré moi
Des mouvements secrets redoubler mon effroi.

L’a-t-on remarqué ? Corneille n’a guère peint, dans la tragédie, que des mères ambitieuses ou scélérates, une Arsiuoé, une Mar- celle, une Cléopàtre. Ce caractère de la vraie mère, de la mère si fière de la beauté de sa fille, si ilarmée du malheur suspendu sur sa tête, est une exception qui vaut la peine d’être remarquée. 11 fait contraste avec le caractère du roi Céphée, vieillard d’humeur

��1. Phèdre, V, 6.

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