Page:Crépet - Les Poëtes français, t2, 1861.djvu/363

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DU PERRON


1556 — 1618



On peut dire qu’avec Du Perron commença la poésie de cour, la poésie des nouvelles cours. Ce n’était plus alors le temps des troubadours, ni des trouvères, ni des amuseurs royaux comme le gentil Marot. La royauté voguait ver& les temps difficiles. La Réforme avait donné le branle. La féodalité mourait ; la noblesse pensait, ambitieuse, voulant régner ailleurs que chez elle, dans ses comtés, dans ses baronnies. On approchait du jour oiî, les barrières tombant, ce serait à qui profiterait de la centralisation, à qui saisirait le pouvoir, à qui serait roi de France, puisqu’il y avait enfin une France. L’État surgissait. Jusqu’alors, le Louvre n’avait été qu’un château suprême, cour et donjon. Ses tours dominaient les plus hautes et les plus fières tours du pays de France. Mais l’influence souveraine, la pensée, le biendire, le charme triomphant des lettres ne s’y était pas installé. L’esprit féodal luttait. La Bourgogne avait ses poètes ; la Champagne avait ses conteurs ; le Languedoc bataillait en rimant ; la Bretagne avait ses hommes et s’en glorifiait. Si quelques-uns plaisaient au roi, aux princesses, aux pages et gardes du Louvre, ce n’était pas pour cela des phénix, des maîtres, des nec plus ultra ; on les niait ailleurs. Le moment allait venir où on ne les nierait plus, où on les acclamerait du jour où on saurait que le roi les avait reçus à son lever, que le dauphin leur avait souri, que la reine les avait écoutés. Avec l’unité politique que rêvait Henri IV, que prépara Richelieu et que consomma Louis XIV, devait naître l’unité de goût, de mode, d’engouement. Le soleil allait se lever au Louvre, s’y lever et s’y coucher ; un seul soleil littéraire, qui luirait pour toute la France. Plus de verve locale, plus d’originalité, moins d’abandon, de libre allure et de verte spon-