Page:Crépet - Les Poëtes français, t2, 1861.djvu/562

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JEAN-FRANÇOIS SARRAZIN


1603 — 1654



On a dit de Sarrazin et de Voiture qu’ils avaient créé la littérature de société. C’est —un jugement qu’il est bon de contrôler aujourd’hui qu’on s’est habitué à entendre par ces mots une littérature en quelque sorte improvisée, plus semblable à une conversation qu’à un ouvrage de poëte ou d’artiste. Au moins faudrait-il tenir compte de ce qu’étaient la société pour laquelle rimèrent Voiture et Sarrazin, et l’époque où ils vécurent : la société de l’hôtel de Rambouillet et de l’hôtel de Longueville, l’époque de Corneille, de Balzac, de Richelieu, de Condé, de Descartes ; c’est-à-dire une époque oii tout était grand, une société exquise et grave, habituée à ne supporter en rien le médiocre ni le vulgaire et qui, jusque dans les productions les plus légères de l’esprit, exigeait de l’art et du génie. Aussi ne trouvons-nous pas dans les œuvres les plus badines de Sarrazin la négligence, le lâché auxquels s’accoutumèrent les poètes de la cour de Sceaux et de la société du Temple, et généralement tous les poëtes du xvni « siècle. Sarrazin, comme Voiture, est un artiste qui n’élude aucune des difficultés de son art, et qui, au contraire, les accepte et les résout avec une sûreté admirable. C’est donc le petit nombre de ses œuvres en vers et leur frivolité, plutôt que leur imperfection, qui l’a fait mettre au rang des poè’tes de second ordre. On sait ce que pensait Balzac de la prose de Sarrazin qu’il croyait destiné à donner à la France un Salluste : la Conspiration de Walstein a été réimprimée par Nodier dans sa collée-^ tion des Petits classiques français^. Et dernièrement encore, M. Victor Cousin disait de ce morceau et de la Relation du siège de Dunkerque,

1 Paris. Delangle, 1825. 8 vol. in-16.