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PARNY


1753 — 1814



La gloire de Parny s’est effacée ; le nom de l’aimable créole ne fait guère plus de bruit désormais que celui de son compatriote et de son ami Bertin. On est même assez disposé à le dédaigner et à l’oublier, depuis qu’à ses élégies erotiques ont victorieusement succédé les élégies grecques d’André Chénier et les élégies religieuses de Lamartine. Que nous importe maintenant l’Éléonore de Parny ? Notre seule Éléonore est celle du Tasse. Combien de lecteurs contemporains ont parcouru les Déguisements de Vénus, la Guerre des Dieux, les Galanteries de la Bible, la Journée champêtre, Isnel et Asléga, les Chansons madécasses, etc. ? Il y a presque toujours un peu d’injustice dans les dédains de la postérité, comme il y a souvent d’aveugles préventions dans les enthousiasmes de la circonstance et du moment. La vérité critique n’est au fond qu’une moyenne exacte, déterminée par un instrument sûr, entre les diverses hauteurs des changeantes marées de l’opinion publique. ÉvaristeDésiré Desforges de Parny a été salué dans son temps comme le vengeur du naturel étouffé sous les roses peintes de Dorât :

Le bel esprit n’est plus, son empire est fini.
Qui donc l’a détrôné ? La Nature et Parny.
Tu vins, tu fis parler le véritable amour.

L’impression de Ginguené, qui nous paraît au moins singulière, était alors celle de tout le monde. Voltaire appelait Parny son cher Tibulle, en le serrant dans ses bras. Français de Nantes le proclamait sans hésiter « le premier poëte classique du siècle de Louis XVI. » Le jeune Chateaubriand, qui fut volontiers le courtisan de toutes les