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58 CHAPITRE PREMIER. ~ LES ORIGINES

partout les déesses piériennes pour les dispensa- trices de rinspiration poétique, et on rattacha à la Piérie par diverses légendes les représentants réels ou fictifs de la poésie transformée.

L'extrême simplicité morale et intellectuelle de ces temps antérieurs à Thistoire se reflétait natu- rellement dans ces antiques créations du génie na- tional. Les populations de la Grèce, autant que nous pouvons en juger, cherchaient alors leur subsis- tance dans le travail dur et obstiné de la terre : ni industrie active, ni grand commerce ; une vie rude, pauvre, asservie et inquiète ; la guerre fréquente, et par conséquent les incursions et les pillages; tout le monde, comme le dit éncrgiquement Thucydide, avait les armes à la main (rraja if) 'EXXi; £T.BT;p5?cp£».). Au lieu de villes ouvertes, des enceintes fortifiées, bâties en pierres énormes sur des collines; et là des chefs de guerre qui sans doute défendaient au besoin riiommo des champs et lui donnaient asile derrière leurs remparts en cas de danger, mais qui aussi, en temps de paix, le pressuraient cruelle- ment et l'assujettissaient à de lourdes corvées. Dans celle existence sombre, la grande joie, c'était la religion des ancêtres et ses fêtes. L'âme naturel- lement poétique de ce peuple si bien doué s'y délassait et s'y retrempait. Ses instincts d'ordre, d'idéal, de grandeur simple le prédestinaient à la prière poétique et chantée. Zeus, l'ancien dieu pélasgique, le maître suprême, l'habitant divin des hautes cimes, Zeus, rélher divinisé, possesseur de la foudre, assembleur de nuages et bienfaiteur sou- verain des hommes, était celui à qui s'adressaient principalement les hommages de la poésie primi- tive. Sous ce nom vénéré, c'était la nature même qu'on adorait d'une manière à demi consciente, la

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