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60 CHAPITRE PREMIER. — LES ORIGINES

devant des auditeurs toujours curieux et ravis l'his- toire future de l'Olympe. Si simple que fût ce chant primitif, sorte de mélopée grave et douce, longue- ment narrative, on ne saurait dire ni même conce- voir aujourd'hui quelles émotions profondes et quel enchantement religieux il faisait naître chez les vieux Cadméens de Thèbes ou chez les Danaëns d'Argos, quand il retentissait auprès de l'autel. Qu'on relise, dans la Théogonie, pour s'en faire une idée, la description si délicieuse de l'hymne nocturne des Muses, « à la voix aussi suave que le lys » : « De leur bouche, le chant s'échappe, charmant et « sonore. La joie se répand souriante dans la de- « meure de Zeus qui fait trembler le monde, elle se « répand avec leur voix douce et caressante. L'écho « la répète au loin sur les cimes neigeuses de « l'Olympe et dans les palais des Immortels*. »

De ces poètes primitifs, dont le rôle fut si grand pourtant dans le progrès de la civilisation, nous ne savons rien; et l'antiquité elle-même ne les a pas mieux connus. Mais pour se dissimuler son igno- rance, elle a créé un certain nombre de personna- lités mythiques, Orphée et Linos, Musée, Eumolpe, Pamphos, dont nous devons dire quelques mots.

Orphée et Linos, prêtres et poètes tous deux, nous sont représentés comme des Thraces, fils de Galliope*. Mais, à vrai dire, ni l'une ni l'autre de ces deux légendes ne semble de nature à nous fournir cet élément de vérité historique qu'on trouve dans un grand nombre d'anciens récits. En ce qui concerne Linos, on est à peu près d'accord au- jourd'hui pour le considérer comme un person-

1. Théogon,, v. 39 et suiv.

2. ApoUodore, I, 3, 2.

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