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LIVRES III ET IV 125

délibérer, à un succès certain et complet pour l'es- poir très incertain d'un succès beaucoup moindre ? Cette invraisemblance énorme n'est même pas atté- nuée par la seule excuse poétique qu'elle eût compor- tée, c'est-à-dire par l'entraînement des passions : car la convention est conclue froidement et solennellement, non entre les combattants, mais entre les deux chefs suprêmes. On va chercher pour cela le vieux Priam dans Troie, on l'amène dans la plaine du Scamandre, et là le pacte est scellé par un sacrifice et des ser- ments, dont le poète nous donne tous les détails. Le combat singulier a lieu ; la description en est con- forme à un type que nous retrouverons plusieurs fois dans V Iliade, Paris va être vaincu et tué, quand Aphrodite le sauve, comme elle sauvera Enée au cinquième livre. Tandis qu'elle le transporte auprès d'Hélène et fait succéder, malgré celle-ci, l'amour aux combats, Ménélas erre au front de l'armée troyenne , cherchant vainement son adversaire dis- paru.

Alors Héré et Athéné, qui ne veulent pas que la convention soit exécutée parce qu'elle sauverait Troie, obtiennent de Zeus l'autorisation de la faire rompre; sans cela la guerre était finie et le serment de Zeus restait sans effet. Pour qu'il n'y ait pas con- tradiction absolue entre le rôle joué ici par Zeus et l'engagement pris par lui envers Thétis, on interprète avec complaisance la pensée du poète : le dieu fait semblant, dit-on, de se laisser contraindre, mais en réalité il connaissait d'avance la prière qui lui serait adressée par les déesses et la faisait entrer dans ses calculs. Nous sommes surpris en ce cas que cela ne soit pas indiqué expressément ; cette antique poésie est d'ordinaire plus naïve. Les deux déesses pous- sent le Lycien Pandaros à une perfidie. De loin,

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