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LIVRE XIII 145

quelque chose d'artificiel. Ce qui dislingue essen- tiellement l'art homérique proprement dit, c'est la simplicité extrême des moyens unie à la grandeur de reflet. L'auteur du onzième livre n'aurait certaine- ment pas eu besoin de cette grosse construction pour créer un épisode dramatique : il nous aurait émus et passionnés tout aussi fortement avec l'attaque et la défense d'une simple palissade. Le récit est fort beau, cela est vrai ; mais il y a quelque naïveté à po- ser comme principe que tout ce qui est beau dans VIliade appartient nécessairement par là même au poète primitif; la vraie question est de savoir si cela est beau du même genre de beauté que le premier livre ou le onzième. Or il est difficile de nier que les narrations du douzième livre ne dénotent un art plus savant, et par là même moins spontané. L'ac- tion esl plus en dehors des personnages, elle n'est pas aussi complètement faite avec leurs passions, elle donne plus de place et d'importance aux événe- ments, et par suite les phases morales n'en sont pas aussinettementmarquees.il faut ajouter que ce récit introduit le troyen Polydamas comme un personnage connu (v. 60), bien que son rôle appartienne aux livres suivants, et qu'il met au premier rang Sarpé- don et ses Lyciens, qu'on ne voit pas figurer dans les chants les plus anciens du poème.

Avec le treizième livre, commence un récit d'un caractère nouveau assez apparent encore sous des interpolations presque évidentes, récit qui remplit les livres XIII et XIV, ainsi que la première partie du livre XV.

Le camp est forcé. Il semble que l'action devrait se précipiter; elle se ralentit au contraire. Zeus, voyant les Troyens victorieux et par conséquent la vengeance qu'il a promise à Achille en voie de se

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