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IX
PRÉFACE

Et plus loin : « Il faudrait que l’historien des lettres, sans lire absolument tous les écrits d’une époque, ce qui serait infini, sût au moins les déguster, et, par l’étude des sujets, du style, de la méthode, évoquer d’entre les morts, comme par une sorte d’incantation, le génie littéraire de ce temps[1]. » N’est-on pas surpris et charmé de rencontrer, au seuil du xviie siècle, une parole aussi lumineuse ? Il semblait que l’histoire littéraire, après cette grande clarté, dût faire des progrès rapides : il n’en fut rien.

On dit quelquefois que l’érudition, depuis la fin du xvie siècle jusqu’au commencement du xixe, subit en Europe une décadence. Ce n’est pas bien certain. Pendant cette période, les grands noms et les grandes œuvres abondent. La paléographie grecque a Montfaucon, non moins illustre par ses travaux sur les monuments figurés. La bibliographie produit un chef-d’œuvre, la Bibliotheca græca de Fabricius, en quatorze volumes petit in-8° (1705-1708), plusieurs fois réimprimée, remaniée, remise au courant (édition de Harless, 1790-1809). La critique verbale est représentée par une longue suite de noms célèbres : les Français Saumaise, Ménage, Guyet dans la première moitié du dix-septième siècle ; plus tard les Anglais ou Hollandais Bentley, Hemsterhuys, Ruhnken, Porson, l’Allemand Reiske, les

  1. … Ut ex eorum non perfectione, id enim infinitum quiddam esset, sed degustatione, et observatione argumenti, styli, methodi, genius iliius temporis litterarius, veluti incantatione quadam, a mortuis evocetur (p. 120).