Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/26

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XII
PRÉFACE

Bossu, dans son Traité du poème épique, sont les docteurs par excellence de cette scolastique d’un nouveau genre. Toute la querelle des Anciens et des Modernes est sortie de là. On adore les anciens ou on les blasphème. Pour la critique littéraire du XVIIe siècle, il n’y a que des degrés sur une échelle unique de perfection. Les uns mettent Homère en haut de l’échelle, et les autres le mettent en bas ; personne, ou presque personne, ne le goûte historiquement dans sa véritable originalité.

Les grands écrivains du xviie siècle sont tous partisans des anciens. La rectitude de leur raison, leur goût sain et relativement simple les a tout de suite mis en communion avec la belle et droite raison des écrivains d’Athènes et de Rome. Et cependant, qui oserait affirmer que le défaut de sens historique n’ait pas nui même au goût littéraire d’un Racine ou d’un Boileau ? Racine sentait vivement le charme littéraire d’Euripide et de Sophocle, cela n’est pas douteux ; mais que pensait-il d’Eschyle ? Et Boileau, l’avocat si chaleureux d’Homère contre Perrault, comment jugeait-il, dans le fond de son âme et une fois le bruit de la lutte apaisé, certaines naïvetés de l’épopée primitive ? Durant tout le xviie siècle, on ne distingue guère les Grecs des Romains : le nom d’Anciens enveloppe à la fois toutes les fines différences et les dissimule. Il y a quelque chose de confus et de mal défini aussi bien dans l’admiration de ceux qui aiment le plus l’antiquité que dans le mépris de ceux qui l’insultent.