Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/269

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LE RECIT. ORDRE ET MOUVEMENT 219

ont travaillé sous les ordres de Phidias, si sensible qu'elle soit, n'a point compromis l'unité générale de l'édifice, de même celle des aèdes homérides n'a point détruit l'unité morale du poème. Tout diffé- rents qu'ils aient été les uns des autres, il y a cepen- dant certains caractères communs de goût, de mesure, de clarté, de vie, qui se retrouvent chez tous à des degrés divers. Ils sont fils du même sol, héritiers de la même tradition, épris des mêmes modèles, dominés par le respect d'une même œuvre. On ne saurait assez dire combien cette variété dans l'unité, si heureu- sement imprimée sur le premier chef-d'œuvre poé- tique du peuple grec, a été utile à la liberté de son développement.

��II.

��Si de cette vue d'ensemble, nous passons à l'étude particulière des cléments dont se compose la beauté totale du poème, la perfection du récit est la pre- mière chose à remarquer. Dans les parties supé- rieures de y Iliade^ cette perfection est incontestable et vraiment éclatante ; dans les autres, l'art du nar- rateur est inégal sans doute, mais, sous l'influence des exemples et de la tradition, il reste partout à une hauteur à laquelle aucune autre épopée en somme ne s'est jamais maintenue.

C'est d'abord par la conception lumineuse des objets représentés que la poésie homérique est admirable. Une vision nette et claire, à laquelle rien d'essentiel n'échappe. Hommes et choses appa- raissent au poète sans confusion ; images distinctes , qui se présentent à son esprit naturellement déga- gées et ordonnées. Une merveilleuse faculté d'ana-

�� �