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LIVRE XVI 305

son origine, de ses aventures antérieures, de sa vie. Son récit servit donc à la fois de complément et de raccord aux chants primitifs'. — Télémaque était censé naviguer pendant ce temps. A la fin du livre, nous quittons Euméc et Ulysse, pour assister à son débarquement. Il envoie ses compagnons à la ville avec le vaisseau, et s'achemine seul vers la demeure d'Eumée.

Le père et le fils se trouvent ainsi en présence. Leur reconnaissance mutuelle est la principale scène du seizième livre, dont elle remplit la première par- tie. Mais le besoin d'assurer la continuité du récit en reliant les unes aux autres les scènes primitives y a fait ajouter ensuite toute une seconde partie sin- gulièrement inférieure en mérite.

Télémaque arrive chez Eumée ; le vieux serviteur accueille son jeune maître avec une joie touchante, et lui présente son hôte, Ulysse, qui s'est donné pour un Cretois et dont Télémaque n'a garde de deviner le secret. Pour que la reconnaissance soit possible, il faut que le poète éloigne Eumée. 11 ima- gine de le faire envoyer par Télémaque à sa mère Pénélope pour l'informer secrètement de son re- tour. On ne peut s'empêcher de remarquer combien celte invention, qui serait bonne en elle-même, con- corde mal avec la fin du livre précédent. Les compa- gnons de Télémaque sont déjà rentrés à Ithaque, sans qu'il leur ait recommandé le silence sur son retour ; ils en ont répandu la nouvelle, et Eumée la trouvera parfaitement connue. Comment donc Télé-

i. Eumée raconte, à partir du vers 420, des choses qu'il n'a pu savoir; nous avons déjà noté ce genre d'invraisemblance dans les livres X et XII. Ce procédé narratif, une fois admis, ne pouvait en efifet manquer d'être imité en raison même de la facilite qu'il donnait au narrateur.

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