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SENTIMENTS RELIGIEUX ET MORAUX 507

semblables à leur père. La prospcriié fleurit partout; et ils n'ont pas besoin de mettre le pied sur un vaisseau, tant la terre bienfaisante est pour eux prodijjue de ses fruits *. »

Voilà certes une logique poussée jusqu'à la plus exacte symétrie: tout le bien possible pour les bons, tout le mal pour les méchants. Une telle netteté de répartition a quelque chose de bien hellénique. Sa naïveté même est d'ailleurs ce qui la rend surtout intéressante : il y a plaisir, lorsqu'on sait se faire an- cien avec les anciens, à entendre parler cet homme si sûr de lui: l'autorité dogmatique avec laquelle il impose ses vues morales à toute chose fait en partie la beauté de son œuvre, parce qu'elle en fait l'unité.

Si son idéal n'est pas très élevé, les sentiments qu'il lui inspire sont forts et sincères, comme tout ce qui vient de celte nature simple. Il est loin d'avoir dans l'esprit un type humain comparable en noblesse à celui du héros homérique. Dans ses ex- hortations, point de déploiement soudain des hautes qualités de l'âme, point d'appel au dévouement héroïque. Toute cette région supérieure de la vertu lui est étrangère. Il déteste la guerre que chantaient les aèdes ioniens, et il la considère comme un fléau que Zcus épargne à ceux qui respectent ses lois(::d- Asixcçte xaxî; xal ojaski; alv/^)- S'il parle des héros qui ont combattu sous les murs de Thèbes et de Troie, c'est pour rappeler qu'ils sont morts misérablement^. Il les qualifie bien « d'hommes divins », louange traditionnelle et par conséquent de peu de valeur; mais en fait, on ne sent pas qu'il éprouve la moindre sympathie pour leurs grandes passions ni le moindre enthousiasme pour leurs exploits. Son

1. Travaux, 225-237.

2. Travaux^ 161-166.

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