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510 CHAPITRE XI. - LES TRAVAUX ET LES JOURS

On comprendra aisément à présent pourquoi les recommandations techniques tiennent si peu de place dans la partie de son œuvre où il semble qu'elles devraient en tenir le plus. L'ennemi qu'il veut combattre, ce n'est pas l'ignorance, c'est le goût de l'oisiveté ou encore le découragement. Hésiode n'a jamais été tenté, comme Virgile par exemple quand il conçut les Géorgiques^ de composer un beau poème régulier qui présentât un ensemble complet de préceptes. Il est douteux même qu'il crût à l'exis- tence d'une science agricole proprement dite. Ce qu'on avait toujours fait en matière de culture lui paraissait enpore bon à faire, et quoiqu'il ne dédai- gnât pas de formuler à l'occasion quelques-unes de ses observations personnelles, il n'avait certainement aucune idée d'en constituer une sorte de traité. Son dessein, quand il énumère les travaux des champs, est en réalité tout autre. Il dresse, saison par saison, la liste des travaux à faire, et, comme un bon sur- veillant, il a soin de la mettre bien en vue afin que chacun connaisse sa tache. Son exactitude provient donc do rintentiou morale qui est tout pour lui. Il éveille son homme de grand matin, il le mène aux champs ou à retable, il le prend par la main quand il le croit dispose à s'échapper, il le conduit jusqu'au sillon commencé, lui montre la charrue attelée et les bœufs sous le joug, et il lui dit: « Voilà ton tra- ce vail ; dépouille-toi de les vêtements et ne crains « pas de peiner sous le soleil. La misère el le mc- « pris t'attendent si tu recules, le bien-être et la joie « du repos mérité, si tu achèves ton sillon à Theurc « dite. » Toute la partie agricole de son poème est ainsi conçue, et pai* là elle se relie intimement à la partie morale : celle-ci prépare celle-là. Il a posé dans l'une ses principes, il en fait dans l'autre l'ap-

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