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520 CHAPITRE XI. ~ LES TRAVAUX ET LES JOURS

même, la grandeur naturelle de l'épopée intervient encore, et la marche de l'action, l'importance dra- matique des personnages, l'intérêt des sentiments ne laissent aux détails descriptifs qu'une valeur accessoire.

Il en est tout autrement dans les Travaux d'Hé- siode. Ici la nature n'est plus simplement un fond de tableau ni un décor; la vie rustique est le sujet même du poème^ et la nature avec le paysan sont au premier plan. Ni l'un ni l'autre d'ailleurs n'y sont idéalisés comme dans l'épopée. Plus de lointains horizons ni de vastes domaines, plus de larges des- criptions éveillant des idées de grandeur, d'abon- dance et d'ordre. Nous sommes à Ascra, au pied de l'Hélicon, mauvais pays, nous dit le poète, brûlé par le soleil en élé, et glacé en hiver par le vent du Nord. On y travaille durement, on y souffre, on y dispute au sol une subsistance incertaine, et on a grand'pcine à s'y défendre des brouillards malsains et des intempéries de l'atmosphère. En outre, le paysan d'Hésiode est pauvre; petit propriétaire éco- nome, qui ne possède qu'un attelage de bœufs, qui fabrique lui-même sa charrue, son vêtement de peau de chèvre cl ses chaussures. Son champ est élroit et ne ressemble en rien aux riches campagnes des bords de THennos. Etranger aux riantes fictions, c'est en pleine réalité que le poète se place ; don- nons-nous le plaisir de l'y suivre.

S'il n'était guère philosophe dans la partie philo- sophique de son poème, à plus forte raison ne le scra-t-il pas dans celle-ci. Donc aucune conception de la nature dans son ensemble, comme force mvs- téricuse et divine ; rien de ces clans enlliousiastes qui abondent chez Lucrèce et chez Virgile. Ce sont les phénomènes naturels eux-mêmes qui font im-

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