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ANALYSE DU POEME 541

duction. Dans quel dessein? Le premier poète avait parlé de lui-même; cela intéressait peu son succes- seur. Une gracieuse fiction lui parut préférable; il imagina de mettre en scène les Muses elles-mêmes et de supposer que c'étaient elles qui récitaient le poème; de là un nouveau début, pour lequel d'ail- leurs il emprunta sans scrupule à son prédécesseur ce qui lui parut convenable:

« Commençons, disait-il en reproduisant les premiers vers du début primitif, commençons par chanter les Muses héli- coniennes, les Muses qui habitent la haute et divine montagne et qui autour de la source sombre dansent d'un pied léger, près de Vautel du puissant fils de Kronos. »

Puis il continuait :

« Elles venaient de se baigner, vierges délicates , dans les eaux du Permesse, ou dans Hippocrène, ou dans rOlmëos divin*; et ensuite, au plus haut de rHélicon, elles avaient formé leurs chœurs de danse gracieux, au rythme vif et char- mant. C'est de là qu'elles partirent enveloppées d'ombres, et s'en allèrent à travers la nuit, jetant dans les airs leur voix enchanteresse; et elles chantaient Zeus qui porte Tcgide, et la divine Héré, déesse d'Argos, aux sandales d'or, et la fille de Zeus, Athéné aux yeux bleus, et Phœbos Apollon, et Artémis aux traits rapides, etc. »

Suit toute une énumération brillante et sonore, premier cortège de dieux qui défilent sous nos yeux avec une pompe royale. L'énumération théogonique, c'est-à-dire le corps du poème s'y rattachait natu-

��1. Ce changement de temps, sur lequel on a beaucoup disserte, me parait s'expliquer ainsi tout naturellement. Les premiers vers retracent l'habitude des Muscs, ce qu'elles font d'ordinaire; les suivants se rapportent à la scène particulière que compose le poète.

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