Page:D’Haussonville - Souvenirs et mélanges.djvu/6

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qu’il aimait beaucoup. J’en ai pris occasion pour écrire au courant de la plume ce que mon père m’avait raconté sur sa famille, sur son père, sur les années de sa jeunesse et de son âge mûr. Quand mon père parlait de lui-même, ce qu’il faisait rarement, ou des choses dont il avait été témoin, ce qu’il aimait assez, c’était avec beaucoup d’entrain et une bonne grâce particulière qui tenait surtout à sa parfaite sincérité, à la façon originale avec laquelle il se mettait lui-même en scène sans s’attribuer jamais le premier rôle et se plaisant plutôt à faire, avec une gaieté charmante, les honneurs de sa propre personne. Resté seul de mon nom, j’ai pris le parti d’écrire le récit de cette vie simple et droite, demeurée toujours si calme au milieu d’événements si agités, afin que mon fils, qui n’a pas connu son grand-père, ne me reproche pas un jour d’avoir laissé rompre entre mes mains le fil fragile qui, de nos jours, relie si faiblement entre elles les générations d’une même famille.




Mon père est né en 1770 ; il était fils de Joseph-Louis, Bernard de Cléron, Comte d’Haussonville, Lieutenant Général, chevalier du Saint-Esprit, grand Louvetier de France, et de Mademoiselle Victoire-Félicité de Guerchy, fille de Régnier, Comte de Guerchy, Marquis de Nangis, Lieutenant Général et Ambassadeur du Roi Louis XVI, en Angleterre. La mère de Mademoiselle de Guerchy était une demoiselle Lydie d’Harcourt, l’aînée des filles du Maréchal Duc d’Harcourt mort sans enfant mâle. Jusqu’au moment du mariage de mon grand-père, les demoiselles d’Haussonville étaient reçues cha-