Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/18

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Mais parmi touts(*) mes parents en connaissances, je ne pouvais faire choix de personne à qui j’osasse confier le gros de mon capital, afin que je pusse aller au Brésil et le laisser en sûreté derrière moi. Cela me jeta dans une grande perplexité.

J’eus une fois l’envie d’aller au Brésil et de m’y établir, car j’étais pour ainsi dire naturalisé dans cette contrée ; mais il s’éveilla en mon esprit quelques petits scrupules religieux qui insensiblement me détachèrent de ce dessein, dont il sera reparlé tout-à-l’heure. Toutefois ce n’était pas la dévotion qui pour lors me retenait ; comme je ne m’étais fait aucun scrupule de professer publiquement la religion du pays tout le temps que j’y avais séjourné, pourquoi ne l’eussé-je pas fait encore[1].

Non, comme je l’ai dit, ce n’était point là la principale cause qui s’opposât à mon départ pour le Brésil, c’était réellement parce que je ne savais à qui laisser mon avoir. Je me déterminai donc enfin à me rendre avec ma fortune en Angleterre, où, si j’y parvenais, je me promettais de faire quelque connaissance ou de trouver quelque parent qui ne serait point infidèle envers moi. En conséquence je me préparai à partir pour l’Angleterre avec toutes mes richesses.

À dessein de tout disposer pour mon retour dans ma patrie, — la flotte du Brésil étant sur le point de faire voile, — je résolus d’abord de répondre convenablement aux comptes justes et fidèles que j’avais reçus. J’écrivis premièrement au Prieur de Saint-Augustin une lettre de remerciement pour ses procédés sincères, et je le priai de vouloir bien accepter les 872 moidores dont il n’avait point

  1. Voir à la Dissertation religieuse.