Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/194

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rer aide et assistance, de vouloir se poser comme les instructeurs de ceux qui les nourrissaient ; donnant à entendre par-là, ce semble, que celui-là ne doit point se faire l’instructeur des autres qui ne peut se passer d’eux pour vivre.

Ils me firent l’affreux récit des extrémités où ils avaient été réduits ; comment ils avaient passé quelquefois plusieurs jours sans nourriture aucune, l’île où ils se trouvaient étant habitée par une espèce de Sauvages plus indolents, et, par cette raison, ils avaient tout lieu de le croire, moins pourvus des choses nécessaires à la vie que les autres indigènes de cette même partie du monde. Toutefois ils reconnaissaient que cette peuplade était moins rapace et moins vorace que celles qui avaient une meilleure et une plus abondante nourriture.

Ils ajoutèrent aussi qu’ils ne pouvaient se refuser à reconnaître avec quelles marques de sagesse et de bonté la souveraine providence de Dieu dirige l’événement des choses de ce monde ; marques, disaient-ils, éclatantes à leur égard ; car, si poussés par la dureté de leur position et par la stérilité du pays où ils étaient ils eussent cherché un lieu meilleur pour y vivre, ils se seraient trouvés en dehors de la voie de salut qui par mon intermédiaire leur avait été ouverte.

Ensuite ils me racontèrent que les Sauvages leurs hôtes avaient fait fond sur eux pour les accompagner dans leurs guerres. Et par le fait, comme ils avaient des armes à feu, s’ils n’eussent pas eu le malheur de perdre leurs munitions, ils eussent pu non-seulement être utiles à leurs amis, mais encore se rendre redoutables et à leurs amis et à leurs ennemis. Or, n’ayant ni poudre ni plomb, et se voyant dans une condition qui ne leur permettait pas de refuser de suivre