Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/362

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très-honnêtement et très-loyalement avec nous dans toutes leurs relations et touts leurs marchés, ce que nous n’avions pas trouvé dans l’autre peuple, ce qui peut-être est dû au reste du christianisme autrefois planté dans cette île par une mission de protestants hollandais : preuve nouvelle de ce que j’ai souvent observé, que la religion chrétienne partout où elle est reçue civilise toujours les hommes et réforme leurs mœurs, qu’elle opère ou non leur sanctification.

De là nous continuâmes à faire route au Nord, nous tenant toujours à la même distance de la côte de Chine, jusqu’à ce que nous eussions passé touts les ports fréquentés par les navires européens, résolus que nous étions autant que possible à ne pas nous laisser prendre, surtout dans cette contrée, où, vu notre position, c’eût été fait de nous infailliblement. Pour ma part, j’avais une telle peur d’être capturé, que, je le crois fermement, j’eusse préféré de beaucoup tomber entre les mains de l’inquisition espagnole[1].

Étant alors parvenus à la latitude de 30 degrés, nous nous déterminâmes à entrer dans le premier port de commerce que nous trouverions. Tandis que nous rallions la terre, une barque vint nous joindre à deux lieues au large, ayant à bord un vieux pilote portugais, qui, nous ayant reconnu pour un bâtiment européen, venait nous offrir ses services. Nous fûmes ravis de sa proposition ; nous le prîmes à bord, et là-dessus, sans nous demander où nous voulions aller, il congédia la barque sur laquelle il était venu.

Bien persuadé qu’il nous était loisible alors de nous

  1. Dans la traduction contemporaine, indigne du beau nom de madame Tastu, où, soi-disant, on se borne au rôle de traducteur fidèle, toute la fin de ce paragraphe est supprimée et remplacée par ce non-sens : C’eût été notre perte, sans aucun espoir de salut. P. B.