Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/387

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

quoique, soit dit en passant, ils ne fussent eux-mêmes qu’une paire de coquins ; car, ajoutant foi à la fable qui nous transformait en pirates, et ne doutant pas que nous ne nous fussions enfuis avec le navire, ils étaient venus nous trouver, non-seulement pour nous vendre la mèche de ce qu’on machinait contre nous, mais encore pour s’en aller faire la course en notre compagnie, et l’un d’eux avoua plus tard que l’espérance seule d’écumer la mer avec nous l’avait poussé à cette révélation. N’importe ! le service qu’ils nous avaient rendu n’en était pas moins grand, et c’est pourquoi, comme je leur avais promis d’être reconnaissant envers eux, j’ordonnai premièrement qu’on leur payât les appointements qu’ils déclaraient leur être dus à bord de leurs vaisseaux respectifs, c’est-à-dire à l’Anglais neuf mois de ses gages et sept au Hollandais ; puis, en outre et par dessus, je leur fis donner une petite somme en or, à leur grand contentement. Je nommai ensuite l’Anglais maître canonnier du bord, le nôtre ayant passé lieutenant en second et commis aux vivres ; pour le Hollandais je le fis maître d’équipage. Ainsi grandement satisfaits, l’un et l’autre rendirent de bons offices, car touts les deux étaient d’habiles marins et d’intrépides compagnons.

Nous étions alors à terre à la Chine ; et si au Bengale je m’étais cru banni et éloigné de ma patrie, tandis que pour mon argent, j’avais tant de moyens de revenir chez moi, que ne devais-je pas penser en ce moment où j’étais environ à mille lieues plus loin de l’Angleterre, et sans perspective aucune de retour !

Seulement, comme une autre foire devait se tenir au bout de quatre mois dans la ville où nous étions, nous espérions qu’alors nous serions à même de nous procurer toutes sortes de produits du pays, et vraisemblablement de