Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/263

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ſetez. Car ie penſois que s’il ſe vendoit ainſi tout entier publiquement auec ſa réponſe, on ne daigneroit pas le vendre en cachette ſans réponſe, & ainſi que perſonne n’en aprendroit la fauſſe doctrine, qui n’en fuſt 5 deſabufé au meſme temps ; au lieu que les réponſes ſeparées qu’on fait à ſemblables liures ſont d’ordinaire de peu de fruit, pource que chacun ne liſant que les liures qui plaiſent à ſon humeur, ce ne ſont pas les meſmes qui ont lû les mauuais liures, qui s’amuſent à 10 examiner les réponſes. Vous me direz, ie m’aſſure, que c’eſt à ſçauoir ſi i’euſſe pu répondre aux raiſons de cét Autheur. A quoy ie n’ay rien à dire, ſinon que i’y euſſe au moins fait tout mon poſſible, & qu’ayant pluſieurs raiſons qui me perſuadent & qui m’aſſurent le 15 contraire de ce que vous m’auez mandé eſtre en ce liure, j’oſois eſperer qu’elles le pourroient auſſi perſuader à quelques autres, & que la vérité, expliquée par vn eſprit méeiocre, deuoit eſtre plus forte que le menſonge, fuſt-il maintenu par les plus habiles gens 20 qui fuſſent au monde.

Pour les veritez eternelles[1], ie dis derechef que ſunt iantum veræ aut poſſibiles, quia Deus illas veras aui poſſibiles cognoſcit, non autem contra veras à Deo cognoſci quaſi independenter ab illo ſint veræ. Et ſi les hommes 25 entendoient bien le ſens de leurs paroles, ils ne pourroient iamais dire ſans | blaſpheme, que la vérité de quelque choſe precede la connoiſſance que Dieu en a, car en Dieu ce n’eſt qu’vn de vouloir & de connoiſtre ; de ſorte que ex hoc ipſo quod aliquid velit, ideò cognoſcit, 30 & ideò tantum talis res eſt vera. Il ne faut donc pas dire

  1. Voir Lettre XXI, page 145, l. 8.