Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/385

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ler tous mes papiers, ou du moins de ne les laiſſer voir à perſonne. Car ie ne me ſuis pû imaginer, que luy qui eſt Italien, & meſme bien voulu du Pape, ainſi que i’entens, ait pû eſtre criminalizé pour autre choſe, 5 ſinon qu’il aura ſans doute voulu eſtablir le mouuement de la Terre, lequel ie ſçay bien auoir eſté autresfois cenſuré par quelques Cardinaux ; | mais ie penſois auoir oüy dire, que depuis on ne laiſſoit pas de l’enſeigner publiquement, meſme dans Rome ; & 10 ie confeſſe que s’il eſt faux, tous les fondemens de ma Philoſophie le ſont auſſi, car il ſe demonſtre par eux euidemment. Et il eſt tellement lié auec toutes les parties de mon Traitté, que ie ne l’en ſçaurois détacher, ſans rendre le reſte tout défectueux. Mais 15 comme ie ne voudrois pour rien du monde qu’il ſortit de moy vn diſcours, où il ſe trouuaſt le moindre mot qui fuſt deſaprouué de l’Egliſe, auſſi aymé-je mieux le ſupprimer, que de le faire paroiſtre eſtropié. Ie n’ay iamais eu l’humeur portée à faire des liures, & ſi ie 20 ne m’eſtois engagé de promeſſe enuers vous, & quelques autres de mes amis, afin que le deſir de vous tenir parole m’obligeaſt d’autant plus à eſtudier, ie n’en fuſſe iamais venu à bout. Mais, après tout, ie ſuis aſſuré que vous ne m’enuoyeriez point de sergent, 25 pour me contraindre à m’acquitter de ma dette, & vous ſerez peut-eſtre bien aiſe d’eſtre exempt de la peine de lire de mauuaiſes choſes. Il y a deſia tant d’opinions en Philoſophie qui ont de l’apparence, & qui peuuent eſtre ſouſtenuës en diſpute, que ſi les 30 miennes n’ont rien de plus certain, & ne peuuent eſtre approuuées ſans controuerſe, ie ne les veux