Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/659

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que, puiſque les eſpaces ou interuales compris entre ces parties, dont les figures ſont ainſi inégales & irregulieres, ne ſçauroient eſtre rons, ſi ce n’eſt par hazard, il s’enſuit, dis-je, que la matiere ſubtile qui 5 remplit ces interuales, ou pores, ne ſera pas ronde, ainſi que des petites boules. Et quand vous voudriez dire que la matiere ſubtile contenue en vn de ces pores, ou interuales, ſeroit compoſée de parties rondes ainſi que de petites boules, puiſque deux boules ne 10 ſe touchent qu’en vn point mathematique, il s’enſuiuroit qu’entre ces parties de la matiere ſubtile, contenuë en vn pore de l’air ou de la terre, il y auroit encore d’autres pores, qui ſeroient vuides ; comme il paroiſt meſme en voſtre figure des petites boules, 15 page 258. Et neantmoins il n’y a rien de vuide dans la Nature.

Venons maintenant au moteur de voſtre matiere ſubtile.

10. En la page 38 de la Diop., vous dites : la 20 Lumiere, c’eſt à dire le mouuement ou l’action dont le ſoleil, ou quelqu’autre des corps qu’on nomme lumineux, pouſſe vne certaine matiere fort ſubtile, qui ſe trouue en tous les cors tranſparans, &c. Par leſquelles paroles, confirmées en la page 160 & 272, vous donnez clairement 25 à entendre que cette matiere ſubtile n’a de ſoy aucun mouuement, mais ſeulement par les corps lumineux, qui l’agitent & la pouſſent.

11. Mais, en la meſme page 160, vous dites que cette matiere ſubtile eſt de telle nature, qu’elle ne ceſſe 30 iamais de ſe mouuoir çà & là grandement viſte. Par leſquelles paroles il s’enſuit qu’il n’eſt aucunement