Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IV.djvu/248

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2}4 Correspondance.

l'affeclion que i'y aporte. Mais ie ne l'ay iamais feu pra- tiquer qu'après que la paj/ion auoit ioué fon rôle. Il y a quelque chofe de fur prenant dans les malheurs, quoy que preueus, dont ie ne fuis maijlreffe qu'après vn certain tems, auquel mon corps fe de for donne fi fort, qu'il me 5 faut plufieurs mois pour le remettre, qui ne fe paffent gueres fans quelque nouueau fuiet de trouble. Outre que ie fuis contrainte de gouucrner mon efprit auec foin, pour luy donner des obiets agréables, la moindre faineantife le fait retomber fur les fuiets qu'il a de s'affliger, & i'ap- 10 prehende que, fi ie ne l'employé point, pendant que ie prens les eaux de Spaa, il ne fe rende plus mélancolique. Si ie pouuois profiter, comme vous faites, de tout ce qui fe prefente a mes fens, ie me diuertir ois, fans le pener. C'ejl a cette heure que ie fens l'incommodité d'eflre vn peu i5 raifonnable. Car, fi ie ne V eflois point du tout, ie trou- uerois des plaifirs communs auec ceux entre lefquels il me faut viure, pour prendre cette médecine auec profit. Et a au point que vous l'ejles, ie me guerirois, comme vous aue^ fait b . Auec cela, la malediclion de mon fexe m'empefche 20 le contentement que me donneroit vn voyage vers Egmond, pour y apprendre les ventés que vous tire^ de voflre nou- ueau iardin. Toutefois ie me confole de la liberté que vous me donne^ d'en demander quelques fois des nouuelles, en qualité de » 5

Voflre tres-affeclionnée amie a vous feruir,

ELISABETH.

Ce 12/22 de lum.

Monfieur Defcartes.

a. Suppléer si ie l'estois [raisonnable]?

b. Voir ci-avant p. 220, I. 28.

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