Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IV.djvu/418

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404 Correspondance.

Monfieur Defcarîes,

Le traité que mon frère Philippe a conclu auec la Republique de Venife m'a fait auoir, tout depuis vojlre départ*, vne occupation beaucoup moins agréable que celle que vous m'auie^ laiffée, touchant vne matière qui 5 pajfe ma fcience, a laquelle ie n'eflois appelée que pour fuppleer a l'impatience du ieune homme a qui elle s'adref- foit. Cela m'a empefché iufquicy de me preualoir de la permijjion, que vous m'aue^ donnée, de vous propofer les obfcurités que ma flupidité me fait trouuer en vojlre 10 Traité des paffions, quoy quelles font en petit nombre, puif qu'il faudroit ejlre impaffiblc, pour ne point com- prendre que l'ordre, la définition & les diflinélions que vous donne^ aux paffions, & enfin toute la partie mo- rale du traité, pajfe tout ce qu'on a iamais dit fur ce i5 fuiet.

Mais puifque fa partie phyfique nejl pas fi claire aux ignorants, ie ne vois point comment on peut fauoir les diuers mouuements du fan g, qui caufent les cinq paffions primitiues,puif qu'elles ne font iamais feules. Par exemple, 10 l'amour efl touiours accompagnée de defir & de ioye, ou de defir & de trifleffe, & a mefure qu'il fe fortifie, les

autres croiffent auffi h , au contraire. Comment efl-il

donc pofjible de remarquer la différence du battement de poulx, de la digeflion des viandes, & autres changements 25 du corps, qui feruent a decouurir la nature de ces mou- uements? Aufji celle que vous notés, en chacune de ces

a. Descartes, qui avait été à La Haye le 7 mars (ci-avant, p. 3-6, 1. n), avait sans doute laissé en manuscrit à la princesse Elisabeth une première ébauche de son Traité des Passions de l'âme. Voir ci-avant p. 3?2, 1. 6.

b. Lacune du MS.

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