Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IV.djvu/592

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578 Correspondance.

Monfieur De/cartes,

le ne fuis pas tant accoutumée aux faneurs de la for- tune, pour en attendre d'extraordinaire; il mefuffit, lors qu'elle ne m'enuoyc pas bien fouuent des accidens, qui donneraient fuiet de trijlejje au plus grand philofophe 5 du monde. Et puifqu'il ne m'en ejl point arriué de fem- blables, depuis mon feiour icy, que les obiets prefents me font tous agréables, & que l'air du pays ne s'accorde pas mal auec ma complexion, ie me trauue en ejlat de pouuoir pratiquer vos lejfons au regard de la gayeté, encore que 10 ie n'en efpere point les effets, dans la conduite de mes affaires, que vous aue^ expérimenté aux ieux de hafard*, parce que le bonheur que vous y aue~ rencontré, au tems que vous e/lier^ d'ailleurs difpofé a la ioye, pro- cedoit, apparemment, de ce que vous tenie~ alors plus '5 librement toutes les parties qui font que l'on geigne ordinairement.

Mais,Ji i'auois fuiet de difpofer de ma perfonne, ie ne me '-epoferois pas fi facilement en vn ejlat hasardeux, ejlant en vn lieu où ïay trouué fuiet de contentement, que 20 dans celuy d'où ie viens. Et pour les mtere/ls de nojlre maifon. il y a longtems que ie les abandonne à la dejlince. )u>Yant que la prudence me/me. fi elle n ejl fecourue d'autres moyens qui nous relient, y perdroit fa peine. Il faudroit vn génie plus fort que celuy de Sacrale h , pour y 2 5 irauaillcr auec fucecs; car, puifqu'il ne luy a fait éuiter l'emprifonnement ni la mort, il n'a pas fuiet de s'en vanter beaucoup. l'ay aujji obferué que les chofes ou ie Jùiuois

a. Voir ci-avant'p. Szy. I. 3o. b Page 53o. I. 3.

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