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82 Œuvres de Descartes. 102-103.

l'entendement, au refpecl de laquelle c'eft de vray vne dénomina- tion extérieure, qu'elle foit objeéliuement dans l'entendement; mais que ie parle de l'idée, qui n'eft iamais hors de l'entendement, & au refped de laquelle ejlre objeâiiiement ne fignifie autre chofe, qu'eftre dans l'entendement en la manière que les objets ont coutume d'y élire. Ainfi, par exemple, fi quelqu'vn demande, qu'efl-ce qu'il arriue au Soleil de ce qu'il eft objecliuement dans mon entendement, on répond fort bien qu'il ne !uy arriue rien qu'vne dénomination exté- rieure, à fçauoir qu'il termine à la façon d'un objet l'opération de

129 mon entendement ; mais fi on ] demande de l'idée du Soleil ce que c'ell, & qu'on réponde que c'elt la chofe penfée, en tant qu'elle eft objediuement dans l'entendement, perfonne n'entendra que c'eft le Soleil mefme, en tant que cette extérieure dénomination eft en luy. Et là eftre objeâiuemeiit dans l'entendement ne fignifiera pas ter- miner fon opération à la façon d'vn objet, mais bien eftre dans l'en- tendement en la manière que fes objets ont coutume d'y eftre ; en telle forte que l'idée du Soleil eft le Soleil mefme exiftant dans l'en- tendement, non pas à la vérité tormelkment, comme il eft au Ciel, mais objediuement, c'eft à dire en la manière | que les objets ont coutume d'exifter dans l'entendement : laquelle façon d'eftre eft de vray bien plus imparfaite que celle par laquelle les chofes exiftent hors de l'entendement; mais pourtant ce n'eft pas vn pur rien, comme i'ay défia dit cy-deuant".

Et lorfque ce fçauant Théologien dit qu'il y a de l'equiuoque en ces paroles, vn pur rien, il femble auoir voulu m'auertir de celle que ie viens tout maintenant de remarquer, de peur que ie n'y prilTe pas garde. Car il dit, premièrement, qu'vne chofe ainfi exi- ftante dans l'entendement par fon idée, n'eft pas vn eftre réel ou aduel, c'eft à dire, que ce n'eft pas quelque chofe qui foit hors de l'entendement; ce qui eft vray. En après il dit aufti que ce n'eft pas quelque chofe de feint par l'efprit, ou vn eftre de raifon, mais quelque chofe de réel, qui eft conceu diftindement; par lefquelles paroles il admet entièrement tout ce que i'ay auancé. Mais neant-

130 moins | il adjoûte, parce que cette chofe ejl feulement conceuë, & qu aâuellement elle n'eft pas (c'eft à dire, parce qu'elle eft feulement vne idée, & non pas quelque chofe hors de l'entendement), elle peut à la vérité eftre conceuë, mais elle ne peut aucunement eftre caufée, c'eft à dire, qu'elle n'a pas befoin de caufe pour exifter hors de l'en- tendement ; ce que ie confefl'e, mais certes elle a befoin de caufe

a. Non à la ligne (i" et 2' édit.).

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