Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IX.djvu/163

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176-177. Troisièmes Objections. ijj

uenable à la raifon, & l'vfage mefme le requiert, que nous apelions de diuers noms ces fubilances que nous connoilTons eftre les fuiets de plufieurs ades ou accidens entièrement differens, & qu'après cela nous examinions fi ces diuers noms fignifient des chofes diffé- rentes, ou vne feule & mefme choie.

Or il y a certains attes que noys apelons corporels, comme la grandeur, la figure, le mouuement, & toutes les autres chofes qui ne peuuent eftre conceuës fans vne extenfion locale, & nous apelons du nom de corps la fubftance en laquelle ils refident ; & on ne peut pas feindre que ce foit vne autre fubftance qui foit le fujet de la figure, vne autre qui foit le fujet du mouuement local, &c., parce que tous ces ades conuiennent entr'eux, en ce qu'ils préfupofent l'eftenduë. En aprez, il y a d'autres actes que nous apelons intellccluels, comme entendre, vouloir, imaginer, fentir, &c., tous lefquels conuiennent entr'eux en ce qu'ils ne peuuent eftre fans penfée, ou perception, ou confcience & connoiffance ; & la fubftance en laquelle ils re- fident, nous difons que c'eft vne cliofe qui peujc, ou vu efprit, ou de quelque autre nom que nous veuillions l'apeller, pourueu que nous ne la confondions point auec la fubftance corporelle, d'autant que les ades intellectuels n'ont aucune affinité auec les a£tes corporels, & que la penfée, qui eft la raifon commune en laquelle ils con- uiennent, diffère totalement de'l'extenfion, qui eft la raifon com- mune des autres.

Mais, après que nousauons formé deux concepts clairs & diftinéls de ces deux fubftances, il eft ayfé de connoiftre, par ce qui a efté dit en la fixiéme Méditation, fi elles ne font qu'vne mefme chofe, ou Ç\ elles en font deux différentes.

��I OBIECTJON TROISIÈME.

Qui a-t'il'donc qui foit dillingué de ma penfée? Qui a-t'il" que l'on puiffe dire eftre feparé de moy-mefme ?

(Jitelqu'vn' répondra peiit-e/frc à celle quejliou : le fuis diftinguc de mapeiijée, moj'-mefme qui penfe ; & quoy qu'elle ne foit pas à la vérité feparée de moy-mejine, elle ejl neanlmoins différente de moj' : de la mefme façon que la promenade {comme il a ejîé dit cy-dejfus) efl di- fliuffuée de celuy qui fe promené. Que fi Monfieur Des Cartes monftre que celuj- qui entende l'entendement font vne mefme chofe, nous tom-

.a. Sic peur Qu'y a-t'il (r% 2' et 3' édit.). — De même p. 1 38, 1.8 et 11. Œuvres. IV. 18

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