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2 22 OEuVRES DE DeSCARTES. 4>7-4i8.

ayent veiijî, dans cette Phyfiqne que vous nous pi-omette\, vous ûure:[ J'ujifamment démontré toutes ces chofes ; il e/l rraj- qu'ils ont de la peine à croire qu'elle nous les puijj'e ft clairement propofcr, que nous les dénions déformais embraser, au preiudice de ce que l'antiquité nous en a apris.

La réponfe que vous aue\ faite aux cinquièmes obi celions a donné lieu au huictiéme fcrupule. Et de vray, comment Je peut-il faire que

350 les verite\ \ Géométriques ou Metaphyfiques, telles que font celles dont vous aue^fait mention en ce lieu-là, j'oyeut immuables & éter- nelles, & que ncantmoins elles dépendent de Dieu ? Car en quel j genre, de câuj'e peuuent-elles dépendre de luy ? Et comment auroil-il peu

faire que la nature du triaiiffle ne fujl point ? ou qu'il n'eu/l pas ejlé vray,de toute éternité, que deux fois quatre fuffent huicl ? ou qu'vn triangle n'eujl pas trois angles? Et partant, ou ces vcrite\ ne dépen- dent que du feul entendement, lorfqu'il penfe, on elles dépendent de l'exi/lence des chofes me/mes, ou bien elles font indépendantes : peu qu'il ne femble pas poffible que Dieu ait peu faire qu'aucune de ces eJJ'ences ou rei'ite- ne fuJl pas de toute éternité.

Enjîn le 9. fcrupule nous femble fort preJJ'ant, lorfque l'ous dites qu'il faut fe défier des feus, €■ que la certitude de l'entendement efl beaucoup plus grande que la leur. Car comment cela pouroit-il ejtre, fi l'entendement mcfme n'a point d'autre certitude que celle qu'il em- prunte des feus bien difpofe-'? Et défait, ne roit-ou pas qu'il ne peut corriger l'erreur d'aucun de nos feus, fi, premièrement, r)i autre ne l'a tiré de l'erreur oit il e/toit luy-mefme? Par exemple, vn baflon paroifi rompu dans l'eau à caufe de la refraclion : qui corrigera cet erreur? fera-ce l'entendement? point du tout, mais le fens du tou- cher. Il en eft de me/me de tous les autres. El partant, fi rue fois vous

351 pouue-y auoir tous vos fens \ bien difpofe^, & qui vous raporteut touf- iours la mefme chofe, tene- pour certain que vous acquerre:^ par leur moyen la plus grande certitude dont vn homme foit naturellement capable. Que fi vous vous fe\ par trop aux raifonnemens de l'o/lre efprit, aJfure\-vous d'eftre fouuent trompé; cai- il arriue afiéy ordi- nairement que nojlre entendement nous trompe en des chofes qu'il auoit tenues pour indubitables.

Voilà en quoy confijlent nos principales difficulté'^; à quoy vous adjoutere-y auffi quelque règle certaine & des marques infaillibles, fuiuant lefquelles nous puijjions connoijire auec cei titude, quand nous conceuons vne chofe fi parfaitement fans l'autre, qu'il foit rray que l'vnefoit tellement difiinéle de l'autre, qu'au moins par la toute puif- fance de Dieu elles puijfent fubfijler feparement : c'ejl à dire, en vn

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