Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IX.djvu/362

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64 Œuvres de Descartes.

ame immédiatement par luy mefme l'idée de cette matière eften- duf, ou feulement s'il permettoit qu'elle fuit caufée en nous par quelque choie qui n'euil point d'extenfion, de figure, ni de mouue- ment, nous ne pourrions trouuer aucune raifon qui nous empef- chail de croire qu'il prend^ plaifir à nous tromper; car nous con- ceuons... cette matière comme vne chofe... différente de Dieu &... de noilre penfée, & il nous femble... que l'idée que nous en auons fe forme en nous à l'occafion des corps de dehors, aufquels elle eft entièrement femblable. Or, puifque Dieu ne nous trompe point, pource que cela répugne à fa nature, comme il a erté def-ja re- marqué ^ nous deuons conclure qu'il y a vne certaine fiibjîance ellenduë en longueur, largeur & profondeur, qui exilte à prefriit dans le monde auec toutes les proprietez que nous connoiflbns mani- felkment luy appartenir. Et cette fubjlance ellenduë efl ce qu'on nomme proprement le corps, ou la fubjlance des chofes matérielles.

63 I 2. Comment nousfqauons aujfi que nojlre ame eji jointe à vn corps.

Nous deuons conclure auffi qu'vn certain corps eft plus eftroite- ment vni à noftre ame que tous les autres qui font au monde, pource que nous appercevons clairement que la douleur & plufieurs autres fentimens nous arriuent fans que nous les ayons préueus, & que nortre ame, par vne connoijjance qui luy eft naturelle, juge que ces fentimens ne procèdent point d'elle feule. . ., en tant qu'elle eft vne chofe qui penfe, mais en tant qu'elle eft vnie à vne chofe eftenduë qui fe meut par la difpojition de fes organes, qu'on nomme pro- prement le corps d'vn homme. Mais ce n'eft pas icy l'endroit où je prétends en traitter particulièrement.

3. Que nosfens ne nous en/eignent pas la nature des chofes, mais feulement ce en quoy elles nous font vtiles ou nuifibles.

Il fuffira que nous remarquions feulement que tout ce que nous apperceuons par l'entremife de nos fens fe rapporte à Tertroite vnion qu'a l'ame auec le corps, & que nous cohnoiffons ordinairement par leur moyen ce en quoy les corps de dehors nous peuuent pro-

a. U édhion princeps donnait : « qu'il ne prend point », mais avec cette correction à V errata : « qu'il prend ».

b. Voir les art. 29 et 36 de la première partie, ci-avant, p. 37-38.

c. '< Il etoit fur le point de trauailler a cette matière quand la mort nous l'a rauv. V. le I art. du traité de l'homme. » [Note MS. de Legrand.)

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